Posted by: africanpressorganization | 19 December 2008

Conférence de presse de Dumisani Kumalo, représentant permanent de l’Afrique du Sud auprès des Nation Unies

 


 

Conférence de presse de Dumisani Kumalo, représentant permanent de l’Afrique du Sud auprès des Nation Unies

 

NEW YORK, 19 décembre 2008/African Press Organization (APO)/ — Conférence de presse de Dumisani Kumalo, représentant permanent de l’Afrique du Sud auprès des Nation Unies

 

 

« Ce ne sont pas forcément les anciens pays colonialistes qui décident de tout au Conseil de sécurité », a déclaré ce matin Dumisani Shadrack Kumalo, Représentant permanent de l’Afrique du Sud auprès des Nations Unies, au cours d’une conférence de presse de fin d’année récapitulant l’expérience de son pays en sa qualité de membre du Conseil de sécurité au cours des deux dernières années.

 

« Au cours de ces deux années passées au sein du Conseil de sécurité, l’Afrique du Sud a voulu promouvoir l’agenda africain et s’assurer que les questions africaines soient traitées plus en profondeur sur de bonnes bases », a-t-il expliqué, tout en relevant que des progrès avaient été accomplis sur ce point, notamment pendant les deux mois de mars 2007 et d’avril 2008, où l’Afrique du Sud a occupé la présidence du Conseil.  Les membres du Conseil se sont rendus par deux fois en Afrique, a noté M. Kumalo.

 

Au cours de ses interventions devant la presse, le représentant sud-africain s’est montré assez critique concernant les méthodes de travail du Conseil de sécurité.  « Cet organe travaille mieux quand ses cinq membres permanents se mettent d’accord », a-t-il remarqué, « mais dans le cas contraire, comme par exemple en ce qui concerne la situation en Somalie, tout devient plus difficile », a-t-il regretté.  Dans certaines zones de conflits, le Conseil a tendance à vouloir laisser les puissances qui ont des intérêts évidents sur la question ou le pays concerné à gérer les problèmes qui se présentent, ses autres membres adoptant alors une attitude en retrait ou de suivisme, a-t-il noté.  Dumisani Kumalo a, à cet égard, cité le cas de la position de la France sur le Tchad, ou encore la question du Moyen-Orient, dont semble s’être accaparée une grande puissance. « Même quand la situation à Gaza était au plus mal, on n’a jamais pu faire adopter une résolution au Conseil », a-t-il fait remarquer.  Il s’est étonné que quand l’Afrique du Sud et d’autres pays ont essayé d’inclure l’occupation du Sud-Liban par Israël dans les efforts de recherche de stabilité que le Conseil voulait déployer en faveur du Liban, on lui ait dit que tout ce qui touche à Israël ne peut être abordé que dans un cadre et un agenda différents.  Les travaux du Conseil sont, de manière artificielle, trop fragmentés, a regretté le représentant sud-africain.

 

« Mais finalement, tout cela nous rappelle que le Conseil de sécurité est l’endroit où il faut être », a estimé M. Kumalo.  Notre participation aux travaux du Conseil en tant que membre nous a permis d’appliquer quelques principes importants et nous avons aussi apprécié, au cours des deux années écoulées, de côtoyer nos amis, a-t-il dit.  L’Ouganda et le Burkina Faso continueront la lutte entreprise en faveur des questions touchant l’Afrique, a-t-il espéré.

 

Répondant à une question relative à la difficulté de s’opposer à l’Administration américaine au sein du Conseil, M. Kumalo a expliqué que l’une des principales difficultés réside dans le fait que les membres permanents du Conseil agissent dans un cadre qu’ils connaissent déjà et côtoient depuis 60 ans.  Mais nous avons appris à discuter avec eux, a-t-il assuré, ajoutant que ces pays ont besoin des voix des autres membres pour faire adopter les résolutions qui leur tiennent à cœur.  Il a regretté cependant que les membres permanents jouent continuellement d’un avantage qu’ils ont acquis au fil des années: celui de prendre connaissance de rapports confectionnés par le Secrétariat alors que ces documents sont en cours d’élaboration.  Certains membres permanents du Conseil arrivent à influencer la rédaction et le contenu de ses rapports, a indiqué M. Kumalo, tout en avouant que l’Afrique du Sud avait elle aussi pu établir les contacts nécessaires pour « avoir la bonne information au moment opportun ».  

 

Si les États-Unis vont avoir un premier Président Africain-Américain et une représentante auprès des Nations Unies qui connait bien l’Afrique, cela ne va pas forcément changer les politiques américaines, a déclaré Dumisani Kumalo.  Les gouvernements peuvent changer et l’occupant de la Maison Blanche aussi.  « Mais j’ai longtemps vécu aux États-Unis, et je sais que les politiques et les intérêts internationaux restent les mêmes », a dit d’un ton réaliste l’Ambassadeur de l’Afrique du Sud.  Il a rappelé que le Président élu Obama a déclaré qu’il voulait « tirer parti des efforts dont est capable son peuple pour s’attaquer aux problèmes que connaît son pays ».  « De notre côté, nous devrions le mettre au défi d’utiliser ces mêmes efforts pour aider à résoudre les questions africaines », a-t-il préconisé.  Il a rappelé, à son crédit, que l’administration Bush avait été très impliquée dans certains problèmes affectant sur le plan humain l’Afrique, comme notamment, la lutte contre le paludisme et le VIH/sida.  « Ce que nous regrettons, c’est que l’Administration sortante ait été absente sur le plan de la paix et de la sécurité », a dit M. Kumalo.

 

Revenant à plusieurs reprises sur la Somalie, le Représentant permanent sud-africain a souligné les efforts accomplis par l’Union africaine en faveur de ce pays et les avancées récentes, et il a émis l’espoir qu’une résolution soit adoptée avant Noël par le Conseil.  Il a rappelé que certains pays africains veulent envoyer des troupes sur le terrain dans le cadre de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM).  On ne peut pas se contenter de regarder le peuple somalien mourir et ne rien faire.  L’AMISOM a besoin d’un soutien réel de la communauté internationale.  Ceux qui ont le droit de véto au Conseil de sécurité ont une responsabilité spéciale, a-t-il souligné, et c’est pour cela qu’ils sont membres permanents.  Il a aussi relevé que le Groupe d’experts sur la Somalie avait établi un rapport sans même avoir mis les pieds dans le pays et s’en est étonné.  Le Conseil a adopté une résolution contre la piraterie en Somalie.  Mais la piraterie n’est qu’une conséquence et symptôme d’un mal plus grand, que le Conseil a négligé, a dit M. Kumalo.

 

Sur la question du Zimbabwe, l’Ambassadeur a jugé le Royaume-Uni « très passionné » dans son implication pour la recherche d’une solution.  Il a souhaité que le Conseil de sécurité demande aux parties au conflit politique du Zimbabwe de former un gouvernement d’unité nationale.  Mais il a souligné que, tant que le Royaume-Uni cherchera un changement de régime et la destitution du Président Mugabe, les choses n’avanceraient pas.  Il vaut mieux renforcer la prévention des conflits que de chercher à simplement se débarrasser du Président du Zimbabwe pour le remplacer par quelqu’un que l’on estime plus amical, a-t-il ajouté.

 

Sur les problèmes posés par les sanctions imposées par le Conseil de sécurité à Al-Qaida et aux Taliban, M. Kumalo a rappelé avoir, dès le début, averti de la nécessité de trouver corrélativement un mécanisme permettant aux personnes figurant sur la liste de prouver qu’elles ne sont pas concernées et de demander à en être radiées.  L’utilisation des sanctions est importante, a-t-il reconnu, mais nous pensons qu’elle est souvent basée sur des informations peu fiables.

 

Après la chute de l’Apartheid, on pouvait espérer que l’Afrique du Sud se battrait davantage pour la promotion des droits de l’homme, comme au Myanmar, a fait remarquer un correspondant.  Dans sa réponse, M. Kumalo a expliqué que l’Afrique du Sud refuserait toujours de servir les intérêts des grandes puissances en permettant que les droits de l’homme soient utilisés de manière politisée dans la recherche de gains stratégiques et économiques.  Le Royaume-Uni aimerait qu’on partage sa position contre le Zimbabwe ou le Myanmar, mais, même si nous ne sommes pas d’accord avec ce qui se passe au Myanmar, par exemple, on ne peut pas utiliser le Conseil pour véhiculer les positions des grandes puissances et ignorer celles des petits pays, a estimé le représentant.  Si ces grands pays se préoccupaient réellement des droits de l’homme, pourquoi n’ont-ils pas soulevé le problème de Guantanamo? a-t-il demandé.  Même si on s’oppose à un gouvernement, on doit quand même dialoguer avec lui, comme dans le cas du Soudan, a-t-il aussi estimé, en faisant remarquer qu’il était irréaliste de vouloir assister des populations dans le besoin tout en refusant de travailler avec le gouvernement.

 

Abordant la question de la dépénalisation de l’homosexualité, soutenue actuellement par la France dans un projet de déclaration, M. Kumalo a rappelé que son pays, qui a souffert de la discrimination raciale, ne veut pas de discrimination basée sur la race, l’orientation sexuelle ou la religion.  « Nous soutenons ce projet de déclaration, mais ne voulons ni pointer un doigt accusateur contre certains pays, ni faire de prosélytisme, et nous ne le signerons pas », a-t-il expliqué, précisant ne pas vouloir condamner ceux qui adoptent d’autres vues.  « C’est la même chose avec la peine de mort, dont nous ne voulons pas chez nous, mais que certains pays, dont certains de nos voisins, pratiquent », a-t-il ajouté.

 

Dans un bilan de ses deux années au Conseil, le représentant a rappelé les succès réalisés en Afrique.  « Si la France n’a pas réussi en Côte d’Ivoire, le Burkina Faso, en tant que voisin, a pu faire avancer les choses et aboutir à l’Accord de paix de Ouagadougou après que l’Afrique du Sud ait joué un rôle important de médiation », a-t-il relevé.  En République démocratique du Congo, il a rappelé le démarrage du dialogue, qu’avait permis l’Afrique du Sud, et le déploiement de la Mission de l’Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo(MONUC).  « Nous avons en outre averti qu’il fallait prévenir un conflit dans l’est du pays », a dit M. Kumalo.  Quant au Burundi, a-t-il poursuivi, l’Afrique du Sud y est intervenue alors que le Conseil et le reste de la communauté internationale tournaient le dos à la situation.  Il a aussi fait remarquer que son pays s’était impliqué dans le renforcement des capacités au Sud-Soudan et dans les élections au Zimbabwe.

 

« Notre pays ne déploie pas ses actions et n’intervient pas parce qu’il serait mû par des appétits de grande puissance, mais il le fait parce qu’il est un pays privilégié du continent africain », a conclu M. Kumalo, tout en se rappelant que ce privilège n’est garanti que dans la mesure où l’Afrique vit en paix.

 

 

SOURCE : NATIONS UNIES


 


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